Quand l'enfant refuse de manger

L. Martin – Février 2011

Les troubles alimentaires sont très variés : la phobie de la déglutition, le trouble boulimique, l’anorexie mentale, … ils ne doivent pas être confondus. Ils concernent aussi bien les filles que les garçons et peuvent débuter dès la naissance. Nous ne traiterons ici que du refus de manger chez l’enfant. Tout au long de sa croissance, l’enfant a besoin de manger pour grandir et se développer. Il a parfois du mal à comprendre l’importance de se nourrir : il joue avec la nourriture, sélectionne les aliments, ou refuse même de manger. Nous allons tenter d’expliquer pourquoi l’enfant refuse de manger et proposer des solutions.

Comprendre…

Les parents ne peuvent pas être insensibles face à un enfant qui refuse de s’alimenter. Après l’incompréhension, ils font place au stress, aux angoisses et à l’énervement. Les repas deviennent alors sources de conflits. Puis peu à peu, le quotidien est rythmé par différents stratagèmes susceptibles de faire manger l’enfant. L’enfant, quelque soit son âge, peut exprimer une souffrance, une angoisse, une difficulté à travers l’alimentation. C’est une façon pour lui de maitriser son corps, de refuser de grandir, de s’opposer à l’adulte. L’enfant exprime sa volonté d’autonomie au travers de la relation qu’il entretient avec sa mère. Il met à distance l’alimentation mais aussi celui qui le nourrit, le plus souvent la mère. L’image de la mère nourricière, celle qui allaite, qui donne le biberon ou la cuillère, met en lumière la dépendance du nourrisson ou de l’enfant. Si celui-ci refuse de manger, elle a alors l’impression de devenir une mauvaise mère. L’important est de ne pas se laisser « dévorer » par cet enfant qui jadis dévorait le sein, et aujourd’hui submerge la mère de culpabilité. Les troubles alimentaires sont très souvent l’expression d’une souffrance psychologique ne pouvant s’extérioriser autrement. C’est pourquoi, consulter un psychologue peut aider l’enfant à prendre conscience d’une difficulté et les parents à y faire face.

« Les troubles alimentaires sont très souvent l’expression d’une souffrance psychologique ne pouvant s’extérioriser autrement. »

Ne confondons pas le refus de manger et l’anorexie infantile. Cette pathologie mentale touche l’enfant et présente un tableau clinique difficile à établir au vue des divers symptômes. Il s’agit d’une restriction alimentaire quantitative et qualitative, accompagnée d’un comportement d’évitement des repas, d’un comportement de dissimulation et la manipulation des parents. L’enfant a une mastication lente, il est actif dans la préparation des repas ou le débarrassage de la table, il arbore diverses techniques d’élimination (cracher, vomir, avaler des laxatifs ou des diurétiques). L’enfant conserve de bons résultats scolaires et intensifie son activité physique. Quatre critères caractérisent cette pathologie : l’enfant refuse de maintenir son poids corporel au dessus du poids minimal ; il a une peur intense de prendre du poids, d’être gros ; il a une altération de la perception de son corps, un déni de la maigreur, qui influencent l’estime de soi ; et l’aménorrhée est présente chez la fille pré pubère.

La suite de l’article donne quelques astuces à mettre en place quand l’enfant ne veut plus manger. Elles ne peuvent être appliquées sans l’avis d’un professionnel qui doit évaluer si elles sont adaptées à la situation.

« Voici quelques astuces, mais l’avis d’un professionnel est important afin de vérifier si elles sont adaptées ou non à la situation. »

Et agir…

Commencer par expliquer à son enfant l’importance de manger : c’est un besoin, mais aussi un plaisir, une envie. Chaque personne a des goûts différents. Manger c’est être ancré dans une chaîne alimentaire. Cela passe par l’équilibre alimentaire, la connaissance des apports nutritionnels. Se nourrir c’est encore transmettre des valeurs comme le partage, l’autonomie, la responsabilité. C’est aussi prendre conscience des accidents domestiques et les prévenir. C’est enfin découvrir différentes spécialités culinaires, apprendre à les cuisiner. Emmener son enfant au marché, à la ferme, au potager, à la crié, c’est l’accompagner dans la découverte des aliments et l’autonomie. Il prend conscience de la diversification alimentaire et accède au choix. Faire de temps en temps les courses avec son enfant lui permet d’anticiper et de comprendre la transformation des aliments en plats (épluchage, découpe, cuisson, …), tout comme l’inviter à cuisiner avec ses parents ou jardiner dans un potager. Lui donner la responsabilité d’un animal en le nourrissant, c’est apprendre l’importance du besoin vital qu’est manger. L’enfant qui a un petit frère ou une petite sœur allaité, a parfois du mal à comprendre que l’allaitement permet au nourrisson de manger. Il est important de le lui expliquer pour pallier à une éventuelle rivalité fraternelle. Différentes techniques pour faire manger l’enfant peuvent être mises en place. Quand l’heure de l’apéritif a sonné pour l’adulte, l’enfant peut aussi en profiter en picorant des bâtonnets de légumes avec les mains, en les trempant dans différentes sauces, … Au moment du repas, mélanger les aliments refusés à d’autres, dessiner dans l’assiette, faire gouter un nouvel aliment avec ce qui est usuellement apprécié, servir de petites quantités, … sont quelques astuces à mettre en œuvre. Détourner l’attention de l’enfant, partager le moment du repas avec lui, mettre de la musique, une bougie, une nappe, un doudou à côté de lui, peuvent rendre la table plus sécurisante et favoriser l’appétit. Inverser l’ordre du repas en commençant par le dessert, diminuer la quantité ingérée au gouter peut aider l’enfant à avoir plus d’appétit au moment du dîner. Créer des menus permettent d’introduire de nouveaux aliments de façon ludique et conviviale (« menu découverte », « soirée plaisir »). Il est parfois tentant de faire du chantage à l’enfant « mange pour faire plaisir à maman » ou « si tu ne manges pas, tu n’aura pas de dessert ». Cependant, ces phrases renforcent l’idée que l’enfant ne mange pas pour lui, pour le besoin vital, pour son plaisir, mais pour celui de l’adulte. Le parent troublé, énervé ou excédé, peut être remplacé par l’autre parent pour donner à manger à l’enfant en bas âge par exemple.

Pour en savoir plus, les parents peuvent consulter 10 astuces de parents pour faire manger de tout à ses enfants…et qu’ils en redemandent de E. Lepetit ou L’enfant anorexique de M.-F. Le HEUZEY ; et les enfants peuvent lire Manger à quoi ça sert ? de S. de Mathuisieulx ou Manger de C. Dolto.